Chris Murphy / Flickr (cc)
De polémique en polémique
En septembre prochain, élèves et professeurs s’apprêtent à vivre une nouvelle rentrée placée sous le signe de la réforme. Près d’un an après la controversée mise en place des nouveaux rythmes scolaires, la généralisation de la réforme des ZEP et le nouveau plan de formation des enseignants seront mis en place en septembre. L’heure sera également aux nouveaux programmes de maternelle ainsi qu’à l’enseignement moral et civique, inscrit dans le parcours citoyen post-attentats. Il s’agit d’une des dernières étapes avant le tournant de 2016, où les nouveaux programmes scolaires entreront en vigueur. Destinés à lutter contre les inégalités scolaires, ils ont suscité l’ire de professeurs et d’intellectuels ainsi que la méfiance des parents. « Réforme fourre-tout », véritable aberration ou danger pour l’avenir des écoliers, les accusations ne manquent pas.
Il faut dire que mesures bousculent les traditions de l’enseignement à la française, avec notamment la très remarquée suppression du latin et du grec. La réforme s’attaque également aux classes bilingues, dénoncées par la ministre comme étant des pôles d’excellence où fermente l’inégalité. Si la ministre a reçu le soutien de l’OCDE, l’Académie Française déplore, quant à elle, « un défaut de structure qui interdit la compréhension », un « affaiblissement des disciplines fondamentales » ainsi qu’un « mauvais coup porté à la langue française ». Les Immortels appellent donc à « résister à la tentation de la facilité » et interrogent la pertinence de cette nouvelle réforme. Dans un contexte où les réformes se succèdent, on ne saurait trop s’inspirer de leur sagesse, afin de répondre à une question centrale : celle de la place de l’école.
Quelle place pour l’école aujourd’hui ?
Car au-delà des divergences, il convient de réfléchir sérieusement au rôle de l’école afin d’éviter une nouvelle refonte des programmes au nom de la sacro-sainte pédagogie. « On ne s’en sortira pas par une « énième réforme » en continuant à charger l’école de multiples objectifs. C’est l’ensemble du système éducatif et de l’enseignement qui est à reconstruire » assène le sociologue Jean-Pierre Le Goff. Car « on est en train de préparer des générations de bavards, capables de parler superficiellement de beaucoup de choses, tout en n’étant plus structurés » explique précise-t-il en dénonçant « les nouvelles technologies de l’information et de la communication exercent une véritable fascination, au détriment des fondamentaux que sont l’écriture, la lecture et le calcul ».
En érigeant la lutte contre l’ennui à l’école, comme seule raison d’être de l’Institution, les repères se brouillent et les énergies s’éparpillent. Et à faire table rase, on se prive des fondamentaux qui ont malgré tout fait leurs preuves depuis des générations. Certes, les intentions sont louables : notre société a évolué pour rentrer dans une nouvelle ère que l’école ne saurait ignorer. Mais ces mutations sont-elles une raison suffisante pour justifier la sempiternelle valse des programmes et des manuels scolaires ?
Il faut bien comprendre qu’ils servent de colonne vertébrale à toute une génération d’élèves et permettent la pérennité d’une instruction publique de qualité, chère à Jules Ferry. C’est aussi ce qu’estime l’éditeur Arnaud Nourry, à la tête d’Hachette, premier éditeur scolaire français, pour lequel éditer des manuels scolaires est le «métier le plus exigeant qui soit », dans la mesure où « aucune légèreté, aucun risque, aucune liberté avec l’histoire ne sont permis : l’objectif d’un manuel scolaire n’est pas de convaincre ou de séduire, mais de forger l’esprit critique».
Aussi, l’adaptation des programmes et des manuels scolaires à l’environnement complexe qu’est notre société contemporaine, mérite d’allier précision et subtilité. Une manière de (re)mettre les fondamentaux à l’honneur et de renouer avec « l’enseignement-artisanat », décrit par Natacha Polony dans sa tribune « Reconstruire l’école », publiée dans Le Figaro. En tout cas, il est certain qu’il faut rompre avec les dérives politico-politiciennes, qui détournent les programmes et manuels scolaires de leurs objectifs initiaux, comme le dénonce Marianne dans son article édifiant « OPA sur les manuels scolaires ».
Car cette réforme, comme les précédentes, entament un peu plus une blessure que l’on refuse souvent de voir : celle de la crise de confiance entre les citoyens et l’Education nationale.
Restaurer la confiance
Pourtant les attentes de la Nation sont fortes s’agissant de l’éducation. Elles s’inscrivent dans la continuité de la culture que chaque Français a à cœur de défendre avec exigence. Or, les parents d’élèves (ou « géniteurs d’apprenants » selon la nouvelle expression consacrée par la réforme) se sentent de plus en plus mis au banc des cancres et exclus de leur rôle, pourtant essentiel, dans la réussite de leurs enfants. Il faut dire que la profusion des textes de lois comme leur contenu, laissent perplexe. « Au-delà de l’activité législative, ce qui me frappe le plus dans cette évolution est le constat du désarroi croissant des familles envers l’école. C’est donc le rapport de confiance entre les parents et l’école qu’il est urgent de restaurer, parce que l’éducation est aussi une transmission qui dépasse le seul enseignement des savoirs », confie Pierre de Panafieu, directeur de l’École Alsacienne.
Cependant, cette dimension essentielle ne semble pas figurer au tableau des priorités fixées par le ministère. Restent l’agitation et les débats inaudibles de technocrates, là où les Français s’attendent à être rassurés et accompagnés sur le long terme. Force est de constater qu’il est difficile de prendre du recul sur une question aussi cruciale que l’éducation. Les mesures radicales semblent pourtant vaines et se serviraient qu’à agiter des peurs dans une société suffisamment crispée. Seul un climat apaisé et serein, permettra à l’écolier de s’élever.
En septembre prochain, élèves et professeurs s’apprêtent à vivre une nouvelle rentrée placée sous le signe de la réforme. Près d’un an après la controversée mise en place des nouveaux rythmes scolaires, la généralisation de la réforme des ZEP et le nouveau plan de formation des enseignants seront mis en place en septembre. L’heure sera également aux nouveaux programmes de maternelle ainsi qu’à l’enseignement moral et civique, inscrit dans le parcours citoyen post-attentats. Il s’agit d’une des dernières étapes avant le tournant de 2016, où les nouveaux programmes scolaires entreront en vigueur. Destinés à lutter contre les inégalités scolaires, ils ont suscité l’ire de professeurs et d’intellectuels ainsi que la méfiance des parents. « Réforme fourre-tout », véritable aberration ou danger pour l’avenir des écoliers, les accusations ne manquent pas.
Il faut dire que mesures bousculent les traditions de l’enseignement à la française, avec notamment la très remarquée suppression du latin et du grec. La réforme s’attaque également aux classes bilingues, dénoncées par la ministre comme étant des pôles d’excellence où fermente l’inégalité. Si la ministre a reçu le soutien de l’OCDE, l’Académie Française déplore, quant à elle, « un défaut de structure qui interdit la compréhension », un « affaiblissement des disciplines fondamentales » ainsi qu’un « mauvais coup porté à la langue française ». Les Immortels appellent donc à « résister à la tentation de la facilité » et interrogent la pertinence de cette nouvelle réforme. Dans un contexte où les réformes se succèdent, on ne saurait trop s’inspirer de leur sagesse, afin de répondre à une question centrale : celle de la place de l’école.
Quelle place pour l’école aujourd’hui ?
Car au-delà des divergences, il convient de réfléchir sérieusement au rôle de l’école afin d’éviter une nouvelle refonte des programmes au nom de la sacro-sainte pédagogie. « On ne s’en sortira pas par une « énième réforme » en continuant à charger l’école de multiples objectifs. C’est l’ensemble du système éducatif et de l’enseignement qui est à reconstruire » assène le sociologue Jean-Pierre Le Goff. Car « on est en train de préparer des générations de bavards, capables de parler superficiellement de beaucoup de choses, tout en n’étant plus structurés » explique précise-t-il en dénonçant « les nouvelles technologies de l’information et de la communication exercent une véritable fascination, au détriment des fondamentaux que sont l’écriture, la lecture et le calcul ».
En érigeant la lutte contre l’ennui à l’école, comme seule raison d’être de l’Institution, les repères se brouillent et les énergies s’éparpillent. Et à faire table rase, on se prive des fondamentaux qui ont malgré tout fait leurs preuves depuis des générations. Certes, les intentions sont louables : notre société a évolué pour rentrer dans une nouvelle ère que l’école ne saurait ignorer. Mais ces mutations sont-elles une raison suffisante pour justifier la sempiternelle valse des programmes et des manuels scolaires ?
Il faut bien comprendre qu’ils servent de colonne vertébrale à toute une génération d’élèves et permettent la pérennité d’une instruction publique de qualité, chère à Jules Ferry. C’est aussi ce qu’estime l’éditeur Arnaud Nourry, à la tête d’Hachette, premier éditeur scolaire français, pour lequel éditer des manuels scolaires est le «métier le plus exigeant qui soit », dans la mesure où « aucune légèreté, aucun risque, aucune liberté avec l’histoire ne sont permis : l’objectif d’un manuel scolaire n’est pas de convaincre ou de séduire, mais de forger l’esprit critique».
Aussi, l’adaptation des programmes et des manuels scolaires à l’environnement complexe qu’est notre société contemporaine, mérite d’allier précision et subtilité. Une manière de (re)mettre les fondamentaux à l’honneur et de renouer avec « l’enseignement-artisanat », décrit par Natacha Polony dans sa tribune « Reconstruire l’école », publiée dans Le Figaro. En tout cas, il est certain qu’il faut rompre avec les dérives politico-politiciennes, qui détournent les programmes et manuels scolaires de leurs objectifs initiaux, comme le dénonce Marianne dans son article édifiant « OPA sur les manuels scolaires ».
Car cette réforme, comme les précédentes, entament un peu plus une blessure que l’on refuse souvent de voir : celle de la crise de confiance entre les citoyens et l’Education nationale.
Restaurer la confiance
Pourtant les attentes de la Nation sont fortes s’agissant de l’éducation. Elles s’inscrivent dans la continuité de la culture que chaque Français a à cœur de défendre avec exigence. Or, les parents d’élèves (ou « géniteurs d’apprenants » selon la nouvelle expression consacrée par la réforme) se sentent de plus en plus mis au banc des cancres et exclus de leur rôle, pourtant essentiel, dans la réussite de leurs enfants. Il faut dire que la profusion des textes de lois comme leur contenu, laissent perplexe. « Au-delà de l’activité législative, ce qui me frappe le plus dans cette évolution est le constat du désarroi croissant des familles envers l’école. C’est donc le rapport de confiance entre les parents et l’école qu’il est urgent de restaurer, parce que l’éducation est aussi une transmission qui dépasse le seul enseignement des savoirs », confie Pierre de Panafieu, directeur de l’École Alsacienne.
Cependant, cette dimension essentielle ne semble pas figurer au tableau des priorités fixées par le ministère. Restent l’agitation et les débats inaudibles de technocrates, là où les Français s’attendent à être rassurés et accompagnés sur le long terme. Force est de constater qu’il est difficile de prendre du recul sur une question aussi cruciale que l’éducation. Les mesures radicales semblent pourtant vaines et se serviraient qu’à agiter des peurs dans une société suffisamment crispée. Seul un climat apaisé et serein, permettra à l’écolier de s’élever.